Christian Lacroix

Couturier, costumier et scénographe

1996 : lauréat du Molière du créateur de costumes pour Phèdre
2007 : lauréat du Molière du créateur de costumes pour Cyrano de Bergerac
2012 : lauréat du prix du meilleur créateur d’élément scénique du Syndicat de la critique pour Peer Gynt
2018 : nommé pour le Molière de la création visuelle pour Le Tartuffe (avec Emmanuel Charles et Joël Fabing)
2024 : nommé pour le Molière de la création visuelle et sonore pour 40° sous zéro (avec Louis Arene et François Menou)

Molières 2024 : les nommés sont …

La liste des nominations pour de la 35ème Nuit des Molières a été annoncée ce mercredi 3 avril. La cérémonie présentée par Caroline Vigneaux, se déroulera le lundi 6 mai 2024 aux Folies Bergère, et sera retransmise sur France 2.

Molière du théâtre privé
4211 km
Le cercle des poètes disparus
Un chapeau de paille d’Italie
Denali

Molière du théâtre public
40° sous zéro
Allosaurus [même rue, même cabine]
Courgette
Welfare

Molière de la comédie
C’est pas facile d’être heureux quand on va mal
Ferme bien ta gueule
Mondial Placard
Vidéo Club

Molière de la création visuelle et sonore
40° sous zéro
Le cercle des poètes disparus
Denali
Neige

Molière du spectacle musical
Mamma Mia
Molière, le spectacle musical
L’opéra de quat’sous
Spamalot

Molière de l’humour
Elodie Poux dans Le syndrome du papillon
Fabrice Eboué dans Adieu Hier
Pablo Mira dans Passé simple
Sophia Aram dans Le monde d’après

Molière du jeune public
Les aventures de Pinocchio
Denver, le dernier dinosaure
Icare
Neige

Molière du seul.e en scène
Le consentement, avec Ludivine Sagnier
La douleur
, avec Dominique Blanc
Kessel, la liberté à tout prix
, avec Franck Desmedt
Va aimer !
, avec Eva Rami

Molière du comédien dans un spectacle de théâtre public
Charles Berling dans Après la répétition/persona
Laurent Lafitte dans Cyrano de Bergerac
Micha Lescot dans Richard II
Roschdy Zem dans Une journée particulière

Molière de la comédienne dans un spectacle de théâtre public
Emmanuelle Bercot dans Après la répétition/persona
Vanessa Cailhol dans Courgette
Laetitia Casta dans Une journée particulière
Marina Hands dans Le silence

Molière du comédien dans un spectacle de théâtre privé
Maxime d’Aboville dans Pauvre Bitos – Le dîner de têtes
Vincent Dedienne dans Un chapeau de paille d’Italie
Stéphane Freiss dans Le cercle des poètes disparus
Thierry Frémont dans Le repas des fauves

Molière de la comédienne dans un spectacle de théâtre privé
Pascale Arbillot dans Interruption
Ariane Ascaride dans Gisèle Halimi, une farouche liberté
Noémie Lvovsky dans Vidéo Club
Cristiana Reali dans Un tramway nommé Désir

Molière de la mise en scène dans un spectacle de théâtre public
Louis Arene pour 40° sous zéro
Christophe Rauck pour Richard II
Pamela Ravassard pour Courgette
Ivo van Hove pour Après la répétition/persona

Molière de la mise en scène dans un spectacle de théâtre privé
Aïla Navidi pour 4211 km
Olivier Solivérès pour Le cercle des poètes disparus
Alain Françon pour Un chapeau de paille d’Italie
Nicolas Le Bricquir pour Denali

Molière de la révélation féminine
Justine Bachelet dans Après la répétition/persona
Nassima Benchicou dans Freud et la femme de chambre
Lucie Brunet dans Denali
Lila Houel dans Daddy
Olivia Pavlou-Graham dans 4211 km
Cléo Sénia dans Music-Hall Colette

Molière de la révélation masculine
Audran Cattin dans Le cercle des poètes disparus
Martin Karmann dans Je m’appelle Asher Lev
Garlan Le Martelot dans Courgette
Ethan Oliel dans Le cercle des poètes disparus
Louis Peres dans Daddy
Hey Yuming dans Les Bonnes

Molière du comédien dans un second rôle
Lionel Abelanski dans Un tramway nommé Désir
Guillaume Bouchède dans Je m’appelle Asher Lev
Florian Choquart dans Courgette
Kevin Razy dans Passeport
Laurent Stocker dans Cyrano de Bergerac
Vincent Viotti dans Courgette

Molière de la comédienne dans un second rôle
Jeanne Arènes dans L’effet miroir
Cécile Garcia Fogel dans Richard II
Charlotte Matzneff dans Le huitième ciel
Alysson Paradis dans Un tramway nommé Désir
Lola Roskis dans Courgette
Josiane Stoléru dans James Brown mettait des bigoudis

Molière de l’auteur.trice francophone vivant.e
Léonore Confino pour L’effet miroir
Julie Deliquet pour Welfare
Jean-Christophe Dollé pour Allosaurus [Même rue, même cabine]
Rudy Milstein pour C’est pas facile d’être heureux quand on va mal
Aïla Navidi pour 4211 km
Yasmina Reza pour James Brown mettait des bigoudis

Parmi les 240 spectacles éligibles, 46 sont nommés dans au moins une des dix-neuf catégories.

(suite…)

La vie de Galilée : élégance et sobriété pour un drôle de destin

© E.C.

Le lustre qui orne le plafond en coupole de la salle Richelieu éblouit toujours les néophytes. Dans La vie de Galilée, il s’impose comme un élément majeur du décor lorsque le public pose avec les comédiens, son œil derrière la lunette astronomique conçue par le héros. Au XVIIe siècle, l’astronome et physicien italien enseigne les mathématiques à l’université de Padoue. Lorsque Ludovico Marsili (Birane Ba ou Julien Frison), son nouvel et riche élève, lui apprend l’invention en Hollande d’une lunette d’approche, il se l’approprie. Sa découverte le conduit à la cour de Florence. Il espère défendre la théorie héliocentrique de Copernic devant Côme de Médicis (Véronique Vella). L’inquisition juge cette thèse dangereuse. Galilée se rétracte sous la menace et finit ses jours prisonnier d’un moine (Gilles David) et surveillé par sa fille. Presque aveugle, il parvient toutefois à écrire les Discorsi qu’il confie à Andrea Sarti lors de sa visite.

Près de trente ans après son entrée au répertoire dans la mise en scène d’Antoine Vitez, c’est au tour d’un autre administrateur général de monter la biographie théâtrale de Bertolt Brecht. La pièce écrite lors de l’exil de l’auteur au Danemark après avoir fui le régime nazi illustre savamment la lutte de la science contre l’obscurantisme. Eric Ruf s’empare avec sobriété de ce combat aux résonances contemporaines dans un colossal écrin artistique qu’il a lui-même imaginé. Une juxtaposition de toiles de grands maitres de la peinture tapisse le fond de scène. Les costumes baroques griffés Christian Lacroix soulignent le faste clérical avec une pointe de fantaisie.

La tête dans les étoiles, Hervé Pierre rend attachant ce savant anti-conformiste qui semble voué au bûcher, tout aussi sympathique lorsqu’il s’évertue à délurer et à peaufiner l’instruction d’Andrea, le fils de sa gouvernante, que lorsqu’il le plante par appât du gain. Jean Chevalier boit ses paroles dans la peau du premier de ses disciples tandis qu’il forme la parfaite complémentarité du spirituel et du matériel avec Madame Sarti, la mère du jeune homme. Florence Viala ne manque pas de mordant pour préserver son patron des conséquences de propager ses célestes thèses. Virginia (Élise Lhomeau) partage cette inquiétude pour le sort du physicien et déploie toute la tendresse d’une fille pour un père peu attentif. Une pléiade de comédiens complète agréablement la distribution.

La vie de Galilée est une biographie théâtrale finement ciselée.

La vie de Galilée à la Comédie-Française (1er).
Du 7 juin au 21 juillet 2019.

L’hôtel du libre-échange : enfin au Français !

© E.C.

Une célèbre comédie de Georges Feydeau fait son entrée au répertoire de la Comédie-Française. L’hôtel du libre-échange promet sécurité et discrétion aux aventures adultères. Angélique s’offusque à la lecture d’un prospectus promouvant les qualités de l’établissement de basse réputation. Pinglet, son époux, choisit ce lieu pour son escapade nocturne avec Marcelle, la femme de son ami et associé Paillardin. La publicité séduit également Victoire, la femme de chambre de Pinglet qui désire y initier à l’amour Maxime, le neveu de Paillardin. Mathieu et ses quatre filles y séjournent également, en attendant de trouver un meilleur gîte dans la capitale.

Habitué à concevoir des costumes pour la maison de Molière, Christian Lacroix y crée, cette fois, outre de superbes tenues, ses premiers décors de théâtre simples et ravissants. Le bureau de Pinglet s’articule autour d’un plateau posé sur des tréteaux dans un style épuré et élégant. Le grand couturier scinde ensuite astucieusement la scène en trois espaces afin de créer deux chambres et le couloir de l’hôtel.

Isabelle Nanty signe la mise en scène, plutôt classique, de ce vaudeville plein de quiproquos. Pour sa première mise en scène au français, elle dirige une distribution de belle envergure. Michel Vuillermoz campe un Pinglet marié de longue date à l’acariâtre Angélique (Anne Kessler), mais épris de Marcelle Paillardin (Florence Viala), craintive rêveuse excédée par le manque d’intérêt de son routinier de mari (Jérôme Pouly). Comme à l’accoutumé, Christian Hecq endosse le rôle du pitre. Il s’agit ici du provincial Mathieu flanqué de son bouillonnant essaim de jeunes filles. Laurent Lafitte compose, lui, le ténébreux tenancier Bastien qui chante les louanges de son hôtel borgne derrière un rideau lumineux. Boulot (Bakary Sangaré), son acolyte se montre plus consciencieux et moins téméraire dans l’accomplissement de son travail. Enfin, Pauline Clément et Julien Frison se révèlent impayables : elle en femme de chambre effrontée et malicieuse, et lui en jeune garçon studieux. Sous la houlette d’Isabelle Nanty, la troupe s’approprie joyeusement cette pièce si connue et pourtant encore inédite au sein de l’institution.

L’hôtel du libre-échange est une vaudeville à la mécanique bien huilée.

L’hôtel du libre-échange à la Comédie-Française (1er).
Du 20 mai au 25 juillet 2017.

Lucrèce Borgia : une séduisante reprise au Français

© E.C.

L’alternance accoutume le public de la Comédie-Français à des comédiens interchangeables qui se glissent d’un jour à l’autre dans un même costume. La reprise de Lucrèce Borgia de Victor Hugo à la salle Richelieu diffère de la stricte application du troisième pilier du Français. Lors de sa création, Denis Podalydès attribuait le rôle titre à Guillaume Gallienne. Trois ans plus tard, il choisit Elsa Lepoivre. Cette redistribution modifie l’essence de la rencontre entre Lucrère Borgia et Gennaro, son fils caché. En outre, la noirceur du personnage principal s’atténue. Dans une mise en scène aux déplacements identiques, l’incroyable violence de la scène dans laquelle les princes vénitiens acculent la fille naturelle du pape perd en intensité. Les beaux tableaux, eux, demeurent entre la monumentale scénographie d’Éric Ruf et les somptueux costumes de Christian Lacroix.

Sublime, Elsa Lepoivre campe une Lucrèce Borgia moins cruelle et fondamentalement plus féminine. Le nouveau pensionnaire Gaël Kamilindi compose, lui, un Gennaro moins rebelle et plus candide que celui de Suliane Brahim. Le savoureux Éric Ruf reprend le rôle d’Alphonse d’Este, moins corvéable que son épouse le voudrait et risible dans son comportement face à elle. Thierry Hancisse compose un fabuleux Gubetta, perfide trublion assoiffé des manigances sadiques de sa maitresse. Enfin, la jeune garde de la Comédie-Français conquiert l’assemblée en papillonnant chez la princesse Negroni (Claire de La Rüe du Can). Julien Frison séduit dans son interprétation de Maffio Orsini, compagnon d’armes dévoué tandis que Benjamin Lavernhe amuse, en Oloferno Vitellozzo, perturbateur éméché. Si cette reprise de Lucrèce Borgia souffre de la comparaison avec sa « version originale », elle s’avère tout aussi réjouissante. Elle apparaît, par ailleurs, plus classique puisque les comédiens principaux retrouvent leur sexe originel.

Lucrèce Borgia est une tragédie magistrale à tous les niveaux.

Lucrèce Borgia à la Comédie-Française (1er).
Du 22 février au 28 mai 2017.

Roméo et Juliette : une belle adaptation au Français

© E.C.

© E.C.

« O Roméo ! Roméo ! Pourquoi es-tu Roméo? Renie ton père et abdique ton nom ... » Le public connait assurément la célèbre scène du balcon de Roméo et Juliette. Maintes fois adaptée, la tragédie de William Shakespeare apparaît au rang des mythes, si bien que cette « pièce fantôme », comme la qualifie Éric Ruf, n’avait pas été montée au Français depuis plus de 60 ans. L’administrateur général de la maison remédie à cette absence. D’après une traduction de François-Victor Hugo, il déplace l’action en Italie du Sud, entre les années 1930 et 1940.

Les lumières de la salle Richelieu encore allumées, Bakary Sangaré émerge devant le rideau. De sa voix rocailleuse, le choeur annonce l’histoire des amants de Vérone et énonce les précautions d’usages concernant les téléphones portables et les photographies. Le rideau se lève sur une scène digne de bals populaires. Juché sur une estrade au fond de la scène, Serge Bagdassarian chante, façon crooner, devant un parterre de jeunes gens qui virevoltent. La liesse ne dure pas. La haine qui oppose les Montaigu et les Capulet la supplante vite. Dans son adaptation, Éric Ruf privilégie la vendetta entre les deux clans au romantisme. Au cœur de l’imposant décor composé d’immenses pans de mur gris, entre le folklore italien et les costumes homogènes des hommes, la tragédie s’opère dans une version édulcorée du Parrain. Christian Lacroix choisit des tons pâles pour ses créations harmonieuses où le rouge reste la couleur du sang versé particulièrement lors de la scène finale. Les spectateurs pénètrent, alors, dans les catacombes de Palerme où la dépouille de Juliette, debout dans son habit du dimanche, s’éveille, découvre Roméo mort et se poignarde à son tour.

Outre la mise en scène, l’adaptation séduit par la prestation de la troupe. Sous les traits de Jérémy Lopez, Roméo, l’antihéros apparaît un brin ténébreux. Face à lui, la frêle Suliane Brahim incarne une lumineuse Juliette, qui sautille sans cesse. La capricieuse fille des Capulet est bien entourée, entre un père déluré aux multiples facettes (Didier Sandre), une mère enfantine (Danièle Lebrun) et une nourrice protectrice (Claude Mathieu). Éric Ruf décide d’achever la pièce à la mort de Juliette et élude ainsi la réconciliation entre les deux familles. Ce choix cohérent prive malheureusement le public du retour sur scène de certains personnages, mais il ne lui en tient pas rigueur puisque les saluts se répètent et les applaudissements s’éternisent.

Roméo et Juliette est une belle et originale adaptation de l’oeuvre de Shakespeare.

Roméo et Juliette à la Comédie-Française (1er).
Du 5 décembre 2015 au 30 mai 2016.