Au début : genèses à quatre voix

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Trois femmes et un homme racontent le cheminement qui les a conduit à donner la vie. Leurs destins s’entrelacent dans Au début au théâtre du Petit Montparnasse. Les témoignages de ces anonymes, qui dévoileront rarement leurs prénoms par la suite, se distinguent et se reflètent. Mère par accident, ou pour céder au désir de son compagnon, comme pour la cadette, chaque histoire renvoie à une génération au delà de la narration individuelle. Les résonances communes dans les différents parcours appuient ou justifient certains propos.

François Bégaudeau dresse quatre attachants portraits, comme autant de visions de la maternité et de la paternité. Parmi les treize récits qui composaient son roman paru en 2012, l’auteur en a extirpé quatre, en veillant à varier « les angles depuis lesquels appréhender l’étrange aventure de la procréation. » Il a adapté et imbriqué ces textes réalistes pour les planches, à la demande de Panchika Velez. Cette dernière met en scène, avec finesse, ces tourbillons de la vie dans le délicat écrin conçu par Claude Plet. Des chaises en fer forgé rouge entourent un tourniquet, pierre angulaire du décor propice aux jeux d’enfants dans un square.

Recueil poignant et drôle, Au début conserve une empreinte littéraire, puisqu’il s’agit de quatre monologues. Les comédiens animent ces mots et incarnent avec talent ces êtres touchants. Pour garder son homme, Marie accepte à contrecoeur de lui faire un enfant. Rachel Arditi convainc en bobo pestant et s’apitoyant sur son sort à chaque étape de sa grossesse. Les considérations de cette femme-enfant ne pouvaient germer dans l’esprit de Marie-Jo. Philosophe, Marie Ruggeri campe l’ainée, pour laquelle enfanter était dans l’ordre des choses. Elle évoque avec recul son époque sans manuel ou échange d’expérience avec quiconque. Les témoignages de ces deux femmes se réfléchissent tandis que les deux autres se recoupent autour d’un mode de conception peu conventionnel. Nathalie Cerda éblouit dans le rôle de Geneviève, femme à l’apparence terne et au verbe percutant, souffre-douleur de ses camarades depuis sa plus tendre enfance. Son émouvant récit décrit essentiellement son rapport aux autres. Enfin, Éric Savin compose les tourments de Baptiste, qui traverse un chemin long et sinueux entre son premier désir d’être père et la naissance de son enfant. Chaque interprète séduit tellement par sa prestation que l’absence d’interaction entre les quatre personnages laisse un léger goût d’inachevé.

Au début est une pièce patchwork bouleversante surpiquée d’humour.

Au début au théâtre du Petit Montparnasse (14e).
A partir du 6 septembre 2018.
Du mardi au samedi à 21h et les dimanches à 15h.

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